Les changements climatiques sont synonymes de changements dans les risques
La gestion des risques à l’échelle municipale nécessite une perspective stratégique à long terme. Les infrastructures telles que les routes, les ponts et les systèmes de distribution d’eau sont destinés à durer des décennies, de sorte que les choix effectués lors de leur conception et de leur construction influencent directement les risques auxquels les générations futures seront confrontées. Étant donné que le climat a déjà changé et continue de changer, les gestionnaires d’actifs peuvent utiliser les données climatiques pour mieux comprendre et planifier les risques associés.
« Les autoroutes résistantes au climat sont essentielles pour la Colombie-Britannique. La province a amélioré son infrastructure pour faire face à des événements météorologiques extrêmes plus fréquents à l’avenir ».
Rob Fleming, ministère des Transports de la Colombie-Britannique, 2023, s’exprimant sur la reconstruction des autoroutes après l’événement de rivière atmosphérique de 2021. Global News, novembre 2023.
Les changements climatiques sont sur le radar des gestionnaires de risques et des dirigeants municipaux depuis un certain temps, et il existe de multiples initiatives et outils disponibles pour soutenir les professionnels de la gestion des actifs dans leur préparation aux impacts croissants du réchauffement mondial.[1] Donneesclimatiques.ca est l’une de ces ressources qui réunit un réseau de fournisseurs de services climatiques pour soutenir les décideurs dans leurs efforts d’adaptation aux changements climatiques. Les données des modèles climatiques, disponibles sur Donneesclimatiques.ca, fournissent des projections de variables clés comme la température et les précipitations, qui peuvent être utilisées pour évaluer comment un bien sera affecté tout au long de sa durée de vie. Le Fonds municipal vert de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) a mis au point un autre outil gratuit, un cours en ligne complet, à votre rythme, intitulé « Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs , afin d’aider le personnel municipal à apprendre comment tirer parti de leurs processus de gestion des actifs existants pour les aider à devenir plus résilients face aux changements climatiques.
Les changements climatiques ont déjà un impact sur nos actifs
Le climat a déjà changé et nous ne pouvons plus nous fier à la précision des données historiques pour faire des prévisions exactes pour l’avenir. La température mondiale a augmenté de plus de 1 °C au cours des 150 dernières années, et le Canada s’est réchauffé deux fois plus vite que le taux mondial et trois fois plus vite dans le Nord au cours des 120 dernières années.[2] Les phénomènes climatiques tels que les vagues de chaleur ont déjà un impact sur les communautés et mettent à rude épreuve les services d’urgence.[3] Ces dernières années, nous avons également été témoins de saisons de feux de forêt record[4] et d’inondations destructrices. [5]
Évaluer les effets des changements climatiques sur les actifs
Tout d’abord, il est important de définir ce que nous entendons par risque dans ce contexte. Le risque implique ici qu’un phénomène climatique est susceptible d’avoir un impact négatif sur quelque chose (ou quelqu’un). Le degré de vulnérabilité de cette « chose » ou de cette « personne », ainsi que son degré d’exposition à un phénomène climatique donné, est autant de facteurs qui entrent en ligne de compte dans le risque global.
Ensuite, il est important de comprendre la relation entre le climat et le temps. Le climat fait référence aux conditions moyennes sur de longues périodes et dans de vastes régions, et le temps fait référence aux conditions sur de courtes périodes dans des lieux distincts. Les changements dans le climat affectent les situations météorologiques, modifient les moyennes de température et de précipitations, intensifient certains types de conditions météorologiques extrêmes et modifient la probabilité d’événements extrêmes. Ensemble, ces changements peuvent créer de nouveaux phénomènes climatiques ou aggraver ceux qui existent déjà, tels que les inondations, les feux de forêt ou les chaleurs extrêmes.
Figure 1: Facteurs influençant le risque
Une modification des phénomènes climatiques peut donc entraîner une modification du risque global, mais cette relation n’est pas toujours simple. Les phénomènes climatiques se superposent à la vulnérabilité et à l’exposition, ce qui rend le cadre global du risque fluide et dépendant de nombreux facteurs différents (figure 1). Prenons l’exemple de l’impact des vagues de chaleur sur les populations les plus vulnérables de la société, qui peuvent ne pas avoir accès à l’air conditionné, avoir des problèmes de santé préexistants qui augmentent leur sensibilité à la chaleur, ou vivre seules sans personne pour s’occuper d’elles pendant l’événement. Ou encore, un feu de forêt est d’autant plus difficile à gérer lorsque certains itinéraires d’évacuation ont été coupés à cause d’une inondation antérieure (un exemple d’événement composé). Enfin, il est important de reconnaître que les risques peuvent évoluer au fur et à mesure que les biens vieillissent et se détériorent.
Comme le décrit Guy Félio, spécialiste de la gestion des infrastructures et de la résilience climatique, dans l’épisode 2, « Évaluations des risques climatiques et données climatiques », du balado de Donneesclimatiques.ca sur ce sujet, « il ne s’agit pas seulement des actifs, mais de la fonction de ces actifs au fil du temps ».[6] Pour comprendre l’ensemble des risques, il faut donc aller plus loin dans le détail.
Une matrice d’évaluation des risques est un outil couramment utilisé par les décideurs municipaux pour quantifier et illustrer les risques. Ici, les décideurs doivent d’abord déterminer comment la vulnérabilité et l’exposition se combinent pour décrire les conséquences associées à un phénomène climatique particulier. Ces conséquences peuvent prendre de nombreuses formes. Par exemple, il peut s’agir de dommages importants causés à un bâtiment par une crue soudaine, un débordement de ponceau qui entraîne la fermeture de services urbains essentiels comme les transports en commun,[7] ou d’une forte augmentation des appels aux services d’urgence et de la nécessité d’héberger les personnes évacuées à la suite d’une inondation de grande ampleur.
La deuxième dimension de la matrice est la probabilité, c’est-à-dire une mesure de la probabilité d’un phénomène climatique particulier qui est prévue. Cette information peut parfois être difficile à trouver. Les courbes historiques d’intensité, de durée et de fréquence (IDF) des pluies sont souvent utilisées pour calculer la période de retour d’une tempête de pluie particulièrement intense. Cependant, d’autres sources de données et d’informations peuvent être utilisées pour déterminer la probabilité, par exemple en discutant avec des résidents de longue date pour voir s’ils se souviennent d’événements d’une ampleur similaire au cours de leur vie.
Figure 2 : Matrice d'évaluation des risques et notation des risques
L’intersection entre la probabilité et la conséquence qui en résulte est le risque. Dans la figure 2, les carrés colorés en vert foncé ou en vert clair présentent un risque relativement faible par rapport aux carrés jaunes et rouges. Un événement qui a très peu de chances de se produire, mais qui est associé à des conséquences importantes, peut présenter un risque similaire à un événement qui a très peu de chances de se produire, mais qui n’entraîne que très peu de perturbations.
Les changements climatiques affectent les risques de deux manières principales : tout d’abord, un phénomène climatique particulier pourrait être amené à se produire plus fréquemment à l’avenir. Visuellement, cela reviendrait à déplacer le marqueur de risque historique vers le haut de la matrice des risques. De même, l’évolution de l’intensité d’un événement déplace le marqueur de risque vers la droite sur ce diagramme, signalant l’augmentation des conséquences associées à un événement plus intense.
Des centres d’information tels que Donneesclimatiques.ca peuvent être utilisés pour trouver les informations nécessaires à l’évaluation des changements de fréquence et d’intensité. Un exemple serait l’utilisation des données IDF décalées dans le temps qui aident à démontrer l’effet de l’augmentation des températures sur les événements pluvieux de forte intensité. Des outils de formation tels que le cours en ligne de la FCM
« Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs » permettent de développer les connaissances et les processus relatifs à l’utilisation de ces données pour éclairer les décisions.
Utiliser les évaluations des risques liés aux changements climatiques pour mieux gérer les actifs
Voici quelques moyens pour une municipalité d’intégrer les données relatives aux changements climatiques et l’évolution des risques qui en découle dans le travail de gestion des actifs :
- Registre des actifs: Intégration des données climatiques dans un registre des actifs pour mettre à jour les attributs des actifs afin de mieux informer les évaluations de leur état et d’orienter les besoins d’entretien.
- Gestion des risques: Anticiper et évaluer les risques, y compris les risques liés au climat, et savoir comment les atténuer.
- Coût du cycle de vie: Incorporation de données climatiques dans l’évaluation des coûts du cycle de vie afin de tenir compte de l’impact potentiel des scénarios futurs de changements climatiques sur les besoins en matière d’entretien, de réparation et de remplacement.
- Prestation de services durables: Prendre en compte les changements climatiques aujourd’hui et à l’avenir pour s’assurer que les actifs peuvent fournir des services d’une manière durable sur le plan environnemental et économiquement efficace à long terme.
Comme le montrent les exemples ci-dessus, il existe une formidable occasion d’améliorer la résilience des municipalités aux changements climatiques par le biais des processus de gestion des actifs. Fondamentalement, la gestion des actifs consiste à équilibrer les coûts, les opportunités et les risques par rapport aux niveaux de services souhaités. Une gestion efficace des actifs dépend de l’utilisation de données fiables pour guider les décisions. Les données nécessaires pour prendre des décisions mieux informées comprennent généralement des données sur les coûts des actifs et du cycle de vie, des informations sur les niveaux de service et des évaluations des risques. Les données climatiques complètent ces ensembles de données et, en les intégrant, les municipalités peuvent se faire une idée plus complète de la manière dont les phénomènes et les risques climatiques propres à un lieu peuvent avoir une incidence sur leurs infrastructures et, par conséquent, sur leur capacité à maintenir les niveaux de service attendus.
Un processus d’évaluation des risques climatiques offre également aux gestionnaires d’actifs une occasion importante d’intégrer des données démographiques et géographiques, ce qui contribue à améliorer la sensibilisation et la prise de décision pour les groupes méritant l’équité, qui sont souvent confrontés à des impacts disproportionnés des risques climatiques .[8]
Le cours en ligne gratuit de la FCM, que vous pouvez compléter à votre propre rythme, intitulé « Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs » explique ces relations interconnectées. En suivant ce cours, les participants apprendront à :
- Décrire les concepts de durabilité et de résilience par rapport à la gestion des actifs.
- Expliquer l’impact des changements climatiques et des phénomènes météorologiques extrêmes sur les différentes régions et les différents groupes de personnes au Canada.
- Appliquer le « Cadre sur les changements climatiques pour les niveaux de service et de risque » (le Cadre) dans votre gouvernement local.
Les apprenants sont impliqués par le biais de leçons, d’outils, d’exemples, de scénarios et d’un manuel pratique.
Figure 3: « Le cadre des changements climatiques pour les niveaux de service et de risque", tiré du cours en ligne de la FCM « Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs ».
La première phase du cadre (figure 3) est celle où s’effectue la majeure partie de la collecte des données, notamment la compréhension des informations climatiques régionales et locales et des phénomènes climatiques. C’est au cours de cette phase du processus que les utilisateurs établissent les bases dont ils ont besoin pour l’évaluation des risques et la planification des mesures d’adaptation.
De nombreux gouvernements locaux au Canada ne disposent pas d’experts en données climatiques au sein de leur personnel, de sorte que la recherche et la compréhension des données climatiques peuvent parfois sembler déconcertantes. Le cours fournit des conseils au personnel municipal – qui n’est pas forcément expert en climatologie – sur la recherche et l’utilisation des données climatiques pour éclairer la prise de décision. Lors d’un webinaire organisé par la FCM, intitulé « Données climatiques en action : Renforcer les projets d’adaptation municipaux », Casey Clunas, du Centre canadien des services climatiques, décrit quelques-uns des moyens faciles d’accès dont disposent les municipalités canadiennes pour se familiariser avec leurs propres données climatiques locales.
Dans le même enregistrement de webinaire, les présentateurs du comté de Dufferin, en Ontario, et de la ville de Calgary, en Alberta, décrivent comment ils ont trouvé et exploité leurs données climatiques pour éclairer leurs stratégies d’adaptation au climat et leurs évaluations des risques.
Mettre en pratique l'évaluation des risques climatiques
Alors que les professionnels de la gestion d’actifs intègrent les changements climatiques dans leur réflexion sur les risques, ils peuvent se tourner vers les fournisseurs de services climatiques pour comprendre comment le climat a changé et comment il changera selon les différents scénarios modélisés pour l’avenir.
Par exemple, lorsque la ville de Selkirk, au Manitoba, a voulu évaluer les risques que les changements climatiques feraient peser sur les actifs et les services municipaux, elle a sollicité l’aide de fournisseurs de données climatiques et de services climatiques. Leur expérience est résumée dans leur stratégie d’adaptation aux changements climatiques (2019-2029), et c’est un exemple fort de données climatiques en action.
L’équipe municipale a travaillé avec le Prairie Climate Centre (PCC) pour utiliser l’Atlas du climat (un site qui fournit des données et des cartes similaires à Donneesclimatiques.ca) et explorer les projections climatiques futures. En réunissant les données climatiques et les connaissances locales, l’équipe a pu établir une matrice des risques et l’utiliser pour orienter la discussion et la prise de décision sur les priorités en matière d’adaptation.
Cet exemple est une façon pour les communautés canadiennes de toutes formes et tailles d’entreprendre une évaluation des risques liés aux changements climatiques tout en profitant du vaste réseau de fournisseurs de services climatiques et d’outils de données climatiques disponibles. En suivant l’exemple de Selkirk, vous pouvez utiliser la page Analyser de Donneesclimatiques.ca pour explorer des variables climatiques spécifiques, trouver des conseils et de l’information dans la Zone d’apprentissage, et découvrir des outils et des données supplémentaires comme les analogues spatiaux, l’humidex, l’information sur les IDF futurs et les zones climatiques des bâtiments dans l’ensemble du site Web. Nos partenaires et collaborateurs disposent d’encore plus de ressources et de soutiens, notamment le cours de la FCM intitulé « Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs » pour développer vos propres capacités en matière de climat et de gestion des actifs, les phénomènes climatiques sur Ouranos, le Centre d’aide du CCSC, le Service d’assistance de CRACO , le Centre de soutien climatique pour la trousse sur le climat de LICC, ClimateWest, CLIMAtlantic, et l’Explorateur de valeurs de calcul du PCIC..
L’infographie ci-dessous présente les étapes générales de la planification des mesures d’adaptation, dans lesquelles les données climatiques sont utilisées tout au long du processus, depuis la planification initiale jusqu’à l’évaluation des risques et la mise en œuvre des mesures d’adaptation.
Figure 4 : Cycle de planification des mesures d'adaptation
Les données peuvent aider à décrire les risques
En définitive, la recherche et la pratique nous montrent que le fait d’avoir en main des données sur les risques liés au climat ne se traduit pas automatiquement par une action. Le risque est un concept rempli de subjectivité, et les données climatiques seules ne peuvent pas nous dire exactement ce qui est à risque et quelles tactiques de gestion doivent être entreprises. Cependant, en travaillant avec des fournisseurs de services climatiques, les gestionnaires d’actifs et les dirigeants municipaux peuvent mettre les données climatiques en contexte et les utiliser pour construire un cadre de risque plus éclairé et faisant autorité. La mise en place d’une base solide de données et de planification peut en fin de compte mener à la mise en œuvre de mesures d’adaptation , telles que celles décrites dans les « Mesures d’adaptation pour mettre en œuvre la résilience climatique » du Fonds municipal vert.
Principaux points à retenir
- Le climat a déjà changé par rapport aux normes historiques et continuera à changer.
- Des variables telles que les précipitations et les températures sont liées à des phénomènes climatiques qui ont un impact sur les infrastructures ainsi que sur les services, les êtres humains et l’environnement.
- L’augmentation des risques climatiques = nécessité d’une meilleure connaissance du climat dans le cadre de la gestion des risques.
- Des outils et des services climatiques sont à votre disposition pour vous aider tout au long de votre parcours.
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Découvrez d’autres outils et connaissances pratiques qui aideront votre municipalité à exploiter les données climatiques pour une gestion résiliente des actifs, comme le cours « Renforcer la résilience climatique grâce à la gestion des actifs » du Centre d’apprentissage du Fonds municipal vert. FCM Connexion et restez au courant des nouvelles du Fonds municipal vert et des dernières ressources, des cours en ligne, des communautés de pratique et du financement.