Incertitudes relatives aux projections climatiques

Pour s’adapter à un climat changeant, il faut composer de manière efficace avec un vaste éventail d’incertitudes. Apprenez-en davantage sur les trois principales sources d’incertitudes relatives aux projections climatiques.

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Incertitudes relatives aux projections climatiques

Pour s’adapter aux changements climatiques, il faut affronter et gérer efficacement un large éventail d’incertitudes. Parmi les sources d’incertitudes, il y a les données et les projections climatiques elles-mêmes.

Bien que nous sachions avec certitude que le climat du Canada évolue, la nature complexe du système climatique, les modèles climatiques et les facteurs humains font en sorte qu’il est difficile de déterminer exactement quelles seront les répercussions de ces changements à un endroit ou à un moment précis. Cependant, tout comme l’achat d’une assurance habitation vous donne la tranquillité d’esprit en vous garantissant que vous serez indemnisé pour d’éventuels dommages, les efforts conscients pour comprendre les incertitudes dans les projections climatiques rendent ces dernières plus faciles à gérer. La prise en compte de l’incertitude augmente votre niveau de préparation.

Pourquoi devrais-je tenir compte de l’incertitude?

Chercher à comprendre les incertitudes associées aux projections climatiques mène à ce qui suit :

Inversement, le fait de ne pas tenir compte des incertitudes peut :

  • dissimuler les risques;
  • miner les efforts de gestion des risques;
  • augmenter les risques de mauvaise adaptation, ce qui aggraverait la situation au lieu de l’améliorer.

 

Quelles sont les sources d’incertitudes?

Il y a trois principales sources d’incertitudes dans les projections climatiques :

Variabilité naturelle interne du climat : Notre climat est influencé par d’importantes fluctuations naturelles imprévisibles qui se produisent même sans variation des concentrations de gaz à effet de serre. La variabilité du climat est attribuable en partie à des phénomènes semi-cycliques comme El Niño et l’oscillation nord‑atlantique. Ce type de variabilité a toujours fait et fera toujours partie du système climatique de la Terre et c’est pourquoi les scientifiques ont représenté ce type de variabilité dans les modèles climatiques au mieux de leurs capacités. Cependant, il existe d’autres déterminants de la variabilité du climat qui sont indépendants du système climatique, par exemple l’activité volcanique et les variations de la production solaire. Comme ils sont en grande partie imprévisibles, ces déterminants ne sont pas pris en compte dans les simulations du climat futur, mais le sont dans les simulations du climat passé parce que leur occurrence et leur incidence sur le système climatique ont été mesurées pendant cette période.

Incertitude des modèles : Il existe de nombreux modèles climatiques qui ont tous été élaborés conformément aux lois fondamentales de la physique. Bien qu’il s’agisse d’outils sophistiqués, ces modèles continuent d’évoluer à mesure que nous comprenons mieux le système climatique et que la technologie progresse. Par conséquent, les modèles demeurent des outils imparfaits, et les simulations du climat peuvent différer de la réalité et réagir un peu différemment aux variations des forçages. En effet, certains modèles climatiques diffèrent sur un certain nombre d’aspects tels que le niveau de simplification, la taille de la grille et la façon dont ils représentent les phénomènes physiques, en particulier ceux qui sont trop petits pour être explicitement simulés (p. ex., nuages, échanges de l’atmosphère de surface, et représentation du sol et de la couverture végétale). Chaque modèle est unique et produira des projections légèrement différentes, même lorsqu’ils sont exécutés selon des scénarios d’émissions de gaz à effet de serre identiques. Pour aider à faire face à ce type d’incertitude, on utilise souvent des ensembles de modèles climatiques pour voir où ils concordent et pour montrer la plage des futurs possibles afin d’aider à la préparation aux changements climatiques.

Incertitude des scénarios d’émissions : L’évolution des émissions de gaz à effet de serre est également incertaine et il n’est pas possible pour le moment de déterminer exactement ce que seront les futures émissions. Par conséquent, les modèles sont exécutés selon différentes trajectoires d’émissions, appelées « trajectoires de concentration représentatives » ou RCP, qui sont fondées sur un ensemble d’hypothèses sur les forces motrices, comme le changement technologique le développement démographique et socioéconomique, et leurs principales interactions. Les RCP fournissent différentes visions de la façon dont l’avenir pourrait se dérouler et, par conséquent, influencent les résultats des projections climatiques. C’est au Canada et aux autres pays du monde qu’il revient de décider si nous voulons un environnement sain et une économie saine.

L’importance relative des changements des trois sources d’incertitudes dépend de l’échelle géographique à laquelle les résultats des modèles sont examinés (sur l’ensemble du globe ou d’un continent, par exemple), de la variable climatique prise en compte (p. ex., température, précipitations ou autres variables), et de  l’horizon de planification et l’échelle temporelle de la variable en question (annuelle, saisonnière ou mensuelle, par exemple). Par exemple, la variabilité naturelle interne est particulièrement importante pour les petites régions et les échelles de temps plus courtes, ainsi que pour les projections des précipitations. L’importance relative peut également varier selon les modèles et les scénarios d’émissions utilisés. Le contexte dans lequel ces types d’analyses sont effectués doit donc être pris en compte.

Exemple 1

L’image ci-dessous (provenant du Cinquième rapport d’évaluation du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat, en anglais seulement) montre l’importance relative des trois différentes sources d’incertitudes dans les projections climatiques de la température moyenne mondiale, en illustrant comment l’importance de chaque source d’incertitudes augmente ou diminue au fil du temps jusqu’à la fin du siècle.

Les panaches de différentes couleurs (orange, bleu et vert) représentent la contribution des différentes sources d’incertitudes à la variation totale de la  moyenne décennale de la température globale.

Le panache orange représente la variabilité naturelle interne. Dans cet exemple qui prend en  compte la température moyenne mondiale, la contribution de l’incertitude sur la variabilité naturelle interne est la plus grande à court terme. La variabilité naturelle interne peut initialement masquer les tendances à long terme associées aux changements climatiques anthropiques.

Qu’est-ce que cela signifie pour la prise de décisions? Cela laisse entendre qu’à court terme, les phénomènes météorologiques passés et les données climatiques historiques peuvent apporter des renseignements importants pour le processus décisionnel.

 

Le panache bleu représente l’incertitude des modèles. Dans cet exemple, l’incertitude des modèles est plus grande au cours de la première moitié du siècle.

Qu’est-ce que cela signifie pour la prise de décisions? Les décisions relatives à l’adaptation au climat au cours de la première moitié du siècle devraient tenir compte des résultats de plusieurs modèles climatiques.

 

Le panache vert représente l’incertitude du scénario d’émissions. Dans cet exemple, la principale source d’incertitudes dans les prévisions des températures moyennes mondiales à la fin du siècle est  les scénarios d’émissions.

Qu’est-ce que cela signifie pour la prise de décisions? Jusqu’en 2050, les projections de température des modèles climatiques sont généralement semblables, quel que soit le scénario d’émissions (émissions élevées, moyennes ou faibles). Les décisions relatives à la prévision des changements climatiques pour le milieu et la fin du siècle doivent tenir compte d’un ensemble de modèles et de scénarios d’émissions multiples, en particulier pour la fin du siècle.

Exemple 2

Dans cet exemple de projections saisonnières des précipitations pour l’Ouest canadien à l’aide de plusieurs RCP et d’un ensemble de modèles climatiques mondiaux (source : https://doi.org/10.1002/joc.6079), nous constatons que la variabilité naturelle interne (en orange) est généralement plus importante au fil du temps que les contributions combinées de l’incertitude des modèles (en bleu) et des scénarios (en vert). La variabilité naturelle interne peut être particulièrement importante pour les petites régions, les échelles temporelles plus courtes (dans ce cas-ci, les saisons) et les horizons de planification plus longs (p. ex., jusqu’à la fin du siècle).

Qu’est-ce que cela signifie pour la prise de décisions? Pour les précipitations sur de plus petites échelles spatiales et sur des périodes plus courtes, la variabilité naturelle interne demeure extrêmement importante au moins jusqu’à la fin du siècle. Bien que les décideurs doivent tenir compte de multiples modèles climatiques et scénarios d’émissions, ils doivent être conscients que la variabilité naturelle interne demeure l’incertitude la plus grande dans les projections de précipitations.

Représentation de l’incertitude sur DonneesClimatiques.ca

Le site DonneesClimatiques.ca permet de gérer ces trois sources d’incertitudes :

  • fournir un ensemble de 24 modèles climatiques différents, au lieu d’un seul modèle, qui ont été élaborés par des groupes de recherche du monde entier;
  • présenter trois scénarios d’émissions différents pour montrer un éventail d’avenirs plausibles, en fonction des différentes quantités de gaz à effet de serre qui pourraient être émis;
  • présenter un horizon temporel long qui s’étend jusqu’en 2100.

Stratégies supplémentaires de planification de l’adaptation pour gérer l’incertitude

Outre les mesures intégrées dans le site DonneesClimatiques.ca qui aident les utilisateurs à gérer les incertitudes, il existe différentes approches qui permettent de tenir compte de l’incertitude des projections climatiques dans le processus décisionnel relatif à l’adaptation. En voici quelques-unes :

Planification par scénarios — englobe la prise en compte de résultats multiples. Un élément clé consiste à déterminer un certain nombre de solutions possibles qui ne limitent pas les résultats à un seul critère d’effet, mais qui laissent plutôt de nombreuses options possibles. On peut ensuite prendre des décisions en comparant la performance de chaque solution dans différentes conditions futures. Des jalons peuvent servir à réévaluer les mesures d’adaptation à la lumière des meilleures données scientifiques accessibles, et des modifications peuvent être apportées aux plans d’adaptation, au besoin.

Gestion adaptative — consiste à trouver des solutions qui peuvent être réévaluées et modifiées à mesure que de nouvelles connaissances sur les variables climatiques et non climatiques deviennent accessibles. L’apprentissage et le suivi constituent une partie importante du processus. 

Mise en œuvre de stratégies robustes et à faible regret – consiste à chercher des solutions et des stratégies qui fonctionneraient raisonnablement bien dans un éventail d’avenirs plausibles.

Pour toute question concernant l’utilisation de données et de renseignements climatiques, veuillez communiquer avec le Centre d’aide des Services climatiques.