Les données climatiques en action : Tendances des degrés-jours de croissance en Nouvelle-Écosse

Introduction

Une récente collaboration entre CLIMAtlantic, Perennia et le ministère de l’agriculture de la Nouvelle-Écosse a permis d’examiner les données climatiques afin d’aider les producteurs locaux de bleuets sauvages à mieux comprendre les changements climatiques. En examinant les degrés-jours de croissance (DJC) – une mesure de la quantité de chaleur disponible pendant la saison de croissance – le projet offre des informations précieuses sur la croissance et le développement des plantes. Par exemple, la recherche a mis en évidence des étapes spécifiques des DJC, telles que l’émergence des plantes et le début de la floraison. Ce modèle GDD est largement utilisé dans l’industrie de la myrtille sauvage en Nouvelle-Écosse. Le modèle prend en compte une date de début du 1er avril et une température de base de 0 degré Celsius.

 

Il est intéressant de noter que le modèle GDD pour les bleuets sauvages révèle 15 seuils cruciaux, liés à l’émergence des plantes, à l’ouverture des fleurs et aux pourcentages de dépérissement des pointes. Par exemple, au cours d’une année fructifère, environ 25 % des tiges devraient avoir des fleurs ouvertes lorsqu’elles atteignent 440 degrés-jours cumulés. Ce type d’information a permis à l’équipe de recherche de déterminer quand chaque seuil de DJC est atteint historiquement et dans les projections du modèle, ce qui l’a aidée à comprendre si ces dates changent au fil du temps.

Quelles sont les données climatiques utilisées?

Ce projet a utilisé les données historiques quotidiennes des stations météorologiques et les données quotidiennes du modèle climatique CMIP6 mises à l’échelle à partir de ClimateData.ca. Les données des stations météorologiques étaient nécessaires pour comprendre la variabilité historique des dates auxquelles les seuils de DJC ont été atteints, et pour identifier s’il y a eu des tendances dans ces dates au sein de l’enregistrement des données d’observation. Les projections climatiques ont été nécessaires pour calculer l’ampleur du changement auquel on peut s’attendre à l’avenir. Les données des stations et les données variables ont été obtenues auprès de ClimateData.ca.

Bien que les données sur les degrés-jours cumulés soient facilement accessibles sur ClimateData.ca à l’échelle annuelle, saisonnière et mensuelle, les données de projection quotidiennes étaient nécessaires dans ce cas pour identifier la date moyenne à laquelle des seuils spécifiques de DJC ont été dépassés. Pour ce faire, il a fallu télécharger les données sur les températures minimales et maximales quotidiennes pour les années 1950 à 2100 pour trois endroits d’intérêt, correspondant à d’importantes régions de production de bleuets sauvages en Nouvelle-Écosse. Les températures moyennes quotidiennes ont été calculées à partir de ces valeurs maximales et minimales, qui ont ensuite été utilisées pour calculer les degrés-jours cumulatifs au-dessus de 0 degré Celsius pour chaque jour de la saison de croissance (du 1er avril au 31 octobre). Les résultats peuvent ensuite être analysés pour déterminer le jour de l’année où chacun des seuils de DJC d’intérêt a été atteint. Les résultats de plusieurs modèles ont été examinés, la valeur médiane des modèles pour chaque année étant utilisée pour calculer une moyenne mobile sur 30 ans.

Que révèlent les données?

Un examen plus approfondi des données historiques des stations météorologiques a montré que les dates moyennes auxquelles les seuils de la DJG sont atteints sont relativement constantes depuis de nombreuses décennies. Bien que les conditions météorologiques puissent changer d’une année à l’autre, dans la plupart des cas, chaque seuil de la DJG est généralement atteint dans une fenêtre de 10 jours par rapport à la moyenne à long terme. Toutefois, un changement notable s’est produit au cours de la période de 30 ans la plus récente (1990-2020), les seuils GDD étant systématiquement atteints plusieurs jours plus tôt. En outre, on observe une nette tendance à la hausse du nombre total de degrés-jours de croissance dans l’historique des données, ce qui suggère que notre climat est en train de changer.

En ce qui concerne l’avenir, une analyse des données du modèle climatique à échelle réduite a permis d’identifier les changements que nous pouvons anticiper dans les années à venir. Par rapport au passé récent (conditions moyennes entre 1980 et 2010), on peut s’attendre à ce que les seuils de DJG soient atteints en moyenne une semaine plus tôt à court terme (2010-2040). Cette avance sera d’environ deux semaines au milieu du siècle (2040-2070) et de près de trois semaines à la fin du siècle (2070-2100) dans le cadre d’un scénario à fortes émissions.

Le tableau ci-dessous présente les résultats pour Truro, en Nouvelle-Écosse. Les chiffres indiquent le jour moyen de l’année où chaque seuil de DJG a été atteint au cours de chaque période, plusieurs colonnes comprenant également le mois et le jour correspondants à des fins d’illustration. Par exemple, on peut voir que l’on peut s’attendre à ce que 10 % de l’émergence des plantes (à 290 DJG) ait lieu le 20 mai (jour 140) pendant la période 1980-2010, le 14 mai (jour 134) pendant la période 2010-2040, le 8 mai (jour 128) pendant la période 2040-2070, et le 3 mai (jour 123) pendant la période 2070-2100. Tous les résultats présentés ici reposent sur un scénario d’émissions élevées (SSP5-8.5).

Tableau 1: Jour moyen de l’année où les seuils de DJG pour l’émergence des plantes, les tiges avec des fleurs ouvertes et le dépérissement des pointes sont atteints à Truro, en Nouvelle-Écosse, calculés à l’aide des données quotidiennes de projection climatique de ClimateData.ca.

Ces changements supposent que le 1 avril restera la date de début de la saison de croissance en Nouvelle-Écosse. Comme le réchauffement climatique se poursuit et que le dernier gel du printemps survient en moyenne plus tôt dans l’année, il se peut que le calendrier de la saison de croissance doive être ajusté à une date plus précoce, ce qui pourrait faire en sorte que les seuils de la DJC soient atteints encore plus tôt.

Comment ces données seront-elles utilisées?

Au fur et à mesure que les caractéristiques climatiques de notre saison de croissance continuent de changer, les producteurs seront confrontés à de nouveaux risques et à de nouvelles opportunités. Les cultures peuvent se développer plus tôt dans la saison, et il est possible de produire plus de nourriture ou de cultiver des types de cultures différents. Toutefois, les températures plus chaudes peuvent également accroître le stress hydrique, les conditions peuvent être plus favorables aux ravageurs et aux maladies, et le calendrier des événements tels que la pollinisation peut changer. Les cultures émergeant plus tôt, elles risquent également d’être plus endommagées en cas de gelées tardives. Si ces travaux sur les tendances en matière de DJG fournissent des indications précieuses sur les effets du climat, il ne faut pas oublier qu’une seule variable ne suffit pas à tout expliquer. Les informations climatiques peuvent nous aider à comprendre les changements climatiques complexes, à faire des choix éclairés sur la production de produits spécifiques comme la bleuet sauvage et, en fin de compte, à mieux positionner le secteur agricole pour qu’il continue à prospérer dans les années à venir.

Remerciements

Ce travail est le fruit d’une collaboration entre le personnel de CLIMAtlantic, de Perennia Food and Agriculture et du ministère de l’Agriculture de la Nouvelle-Écosse.