Un regard approfondi sur les fichiers météorologiques

Cet article offre une perspective de haut niveau sur les fichiers météorologiques existants pour le Canada, élaborés à partir de données historiques, et sur les fichiers des données météorologiques futures qui offrent des informations sur les conditions de conception des bâtiments dans un climat en changement. Le Pacific Climate Impacts Consortium (PCIC) et le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) ont chacun développé un ensemble de fichiers des données météorologiques futures en utilisant des méthodes différentes, mais convergentes sur le plan conceptuel.

Messages clés

  • Les fichiers météorologiques élaborés en tant qu’années météorologiques types (AMT) sont créés en sélectionnant statistiquement les douze mois les plus « typiques » d’une période pluriannuelle.
  • Les sorties des modèles climatiques globaux (MCG) ont une résolution trop grossière pour être utilisées directement dans les simulations de performance des bâtiments. Par conséquent, deux techniques principales de réduction à l’échelle sont utilisées pour préparer les données climatiques à haute résolution nécessaires à la création de fichiers des données météorologiques futures horaires.
  • Le Pacific Climate Impacts Consortium (PCIC) a utilisé la réduction d’échelle statistique et la technique de morphage pour appliquer les projections de changements climatiques aux fichiers météorologiques historiques, produisant ainsi des fichiers des données météorologiques futures décalés pour la simulation énergétique des bâtiments.
  • Le Conseil national de la recherche du Canada (CNRC) a utilisé la réduction à l’échelle dynamique et la méthode de sélection AMT pour produire des fichiers des données météorologiques futures pour différents niveaux de réchauffement climatique, ainsi que des fichiers des données météorologiques futures d’extrêmes et d’humidité pour les simulations hygrothermiques et les simulations des bâtiments entiers.

Comment les fichiers de données météorologiques historiques sont-ils créés et pourquoi est-ce important ?

Les fichiers météorologiques canadiens pour le calcul énergétique (FMCCE) fournissent des données météorologiques historiques couramment utilisées par les concepteurs de bâtiments, les ingénieurs et les modélisateurs énergétiques pour évaluer la performance des conceptions de bâtiments. Les fichiers FMCCE sont développés par l’unité des services climatiques du Service météorologique du Canada (SMC) qui sont également chargés de fournir des données pour le Code national du bâtiment du Canada.

Le jeu de données du FMCCE utilise la méthodologie de l’année météorologique typique (AMT), qui consiste à sélectionner les douze mois les plus « typiques » d’une période d’enregistrement pluriannuelle (15, 20 ou 30 ans de données en continu), pour créer une seule année artificielle, qui représente les conditions météorologiques médianes. Le tableau no. 1 résume l’année réelle à partir de laquelle les données historiques horaires ont été sélectionnées pour chaque mois afin de créer le fichier de données météorologiques du FMCCE pour l’aéroport international de Toronto. Par exemple, le mois de janvier est copié directement à partir des données historiques du janvier qui correspondent le mieux aux conditions moyennes de la période d’enregistrement pour tous les mois de janvier. Cela montre que l’année contribuant à chaque mois peut changer entre chaque itération du FMCCE.

Tableau 1. Détails des fichiers météorologiques canadiens pour le calcul énergétique (FMC) pour l'aéroport international de Toronto.
 

 

FMCCE FMCCE2016 FMCCE2020
Période d’enregistrement 1959 à 1989 1998 à 2014 1998 à 2017
Mois
Janv. 1969 1999 2007
Fevr. 1965 2004 2004
Mars. 1964 2006 2002
Avr. 1964 2009 2009
Mai 1964 2006 2006
Juin 1970 2001 2017
Juill. 1981 2013 1998
Août 1989 2011 2013
Sept. 1978 2003 1998
Oct. 1969 2010 2014
Nov. 1983 2000 2017
Déc. 1961 2003 2004

ENCADRÉ 2.1 Le saviez-vous?

Lors de la sélection statistique des mois « types », les variables se voient attribuer des facteurs de pondération en fonction de leur importance relative et de leur sensibilité dans la simulation des performances des bâtiments. Ainsi, les facteurs de pondération attribués à chaque variable jouent un rôle essentiel dans la sélection des mois types à inclure dans les fichiers météorologiques. Des facteurs de pondération plus élevés appliqués à la température et au rayonnement solaire, par exemple, peuvent entraîner la sélection de mois types plus représentatifs pour ces variables, tout en étant potentiellement moins représentatifs pour les valeurs d’autres variables stockées dans le fichier.

Bien que la méthodologie de l’AMT vise à produire une seule année de données climatiques horaires représentatives d’un lieu donné, elle ne reflète pas nécessairement la climatologie de l’ensemble de la période d’enregistrement à partir de laquelle les données sont choisies – pour deux raisons. Premièrement, la médiane n’est pas nécessairement la moyenne; deuxièmement, la pondération de plusieurs variables peut faire en sorte que le résultat final diffère de la médiane pour les variables individuelles.

Les fichiers de données météorologiques du FMCCE constituent actuellement la meilleure évaluation des conditions climatiques historiques pour la simulation de bâtiments au Canada. Les fichiers météorologiques du FMCCE sont un outil précieux pour l’approximation des conditions typiques pour un lieu donné, mais il s’agit d’une année artificielle, et il est important de comprendre le processus de sélection, les facteurs de pondération et la période d’enregistrement, car non seulement ces éléments ont une incidence sur les résultats des simulations de bâtiments utilisant des fichiers météorologiques historiques, mais ils peuvent également influencer les fichiers des données météorologiques futures qui sont développés. Pour soutenir la conception de bâtiments résistants au climat, il est suggéré d’utiliser des fichiers des données météorologiques historiques et futures dans la simulation de bâtiments. Les sections suivantes décrivent comment deux ensembles de données de fichiers météorologiques futurs sont développés pour le Canada.

Comment sont créés les fichiers météorologiques futurs?

Pour créer des données climatiques adaptées aux applications de simulation de bâtiments, il faut disposer de projections provenant d’un ou de plusieurs modèles climatiques globaux (MCG). Cependant, les sorties des MCG sont souvent fournies à de grandes échelles spatiales (c’est-à-dire à l’échelle mondiale, continentale ou de 100 km) et à des résolutions temporelles quotidiennes ou plus longues (un nombre limité de MCG fournissent des simulations infraquotidiennes). Ces données sont trop grossières pour être utilisées directement dans les simulations de construction qui nécessitent, au minimum, des données horaires pour une position locale. Par conséquent, l’une des deux techniques de réduction d’échelle (voir encadré 2.2) est utilisée pour ajuster les sorties des MCG et obtenir des scénarios de changements climatiques à résolution plus fine à partir des informations initiales des MCG à résolution plus grossière.

En outre, les résultats des MCG peuvent contenir certains biais (erreurs) causés par une série de facteurs, tels que la représentation simplifiée de certains processus physiques comme la formation des nuages et leur interaction dans les modèles climatiques, ou une compréhension incomplète du système climatique mondial. C’est pourquoi il est également important d’ajuster les modèles climatiques afin de corriger les biais. La qualité de l’ajustement dépend de la disponibilité d’ensembles de données de référence de haute qualité.

ENCADRÉ 2.2 Techniques de réduction d'échelle

La première technique est la réduction d’échelle statistique. La réduction d’échelle statistique établit des relations statistiques entre les données climatiques historiques observées et les résultats du modèle climatique pour le même lieu et la même période. Une fois cette relation établie, les projections futures du modèle climatique peuvent être utilisées pour déterminer les valeurs climatiques futures à l’échelle locale. Une méthode de réduction d’échelle statistique couramment employée au Canada est connue sous le nom de méthodologie BCAAQv2, utilisée pour produire les scénarios climatiques canadiens à échelle réduite (Canadian Downscaled Climate Scenarios – CanDCS).

La deuxième technique de réduction d’échelle est la réduction d’échelle dynamique, où la sortie d’un MCG est utilisée pour piloter un modèle climatique régional (MCR). Les MCR, comme les MCG, sont des représentations mathématiques des processus physiques et des interactions entre toutes les parties du système climatique. Un MCR est utilisé pour améliorer la résolution spatiale de la région sélectionnée (Amérique du Nord, Europe) et fournit ainsi une représentation plus précise de la topographie sous-jacente et des limites terre/eau. La résolution spatiale des MCR est généralement comprise entre 10 et 50 km. Cette technique de réduction d’échelle est généralement plus coûteuse en termes de calcul que la réduction d’échelle statistique.

Comment les fichiers des données météorologiques futures sont-ils élaborés par le Pacific Climate Impacts Consortium (PCIC) et le Conseil national de la recherche du Canada (CNRC) ?

Les fichiers des données météorologiques futures développés par le PCIC et le CNRC sont différents en ce qui concerne:

  • La technique de réduction d’échelle utilisée pour fournir des sorties de modèles climatiques à une résolution plus fine requise pour l’utilisation directe dans la simulation de bâtiments ; et.
  • Les techniques utilisées pour incorporer les données météorologiques futures dans les fichiers météorologiques.

Afin d’obtenir des informations climatiques adaptées à la simulation de bâtiments à partir des sorties de MCG, le PCIC a procédé à une réduction d’échelle statistique et à un ajustement des biais des projections climatiques quotidiennes provenant d’un ensemble de 10 modèles climatiques. Pour les valeurs de la température du thermomètre sec, le PCIC a utilisé la méthodologie BCCAQv2 pour réduire l’échelle des projections climatiques des MCG à une résolution de la grille d’environ 10 km x 6 km. Pour la température du point de rosée, l’humidité relative et la pression de surface, les projections climatiques des MCG ont seulement été interpolées à la résolution des données BCCAQv2.

Ensuite, le PCIC a incorporé ces projections, statistiquement réduites à l’échelle, et corrigées des biais dans les fichiers météorologiques en utilisant la « technique de morphage » [1]. La technique de morphage applique trois fonctions de transformation (le décalage, l’étirement et leur combinaison) pour ajuster les valeurs horaires de n’importe quelle variable stockée dans un fichier météorologique historique. C’est pourquoi les fichiers des données météorologiques futures du PCIC sont souvent désignés par l’expression fichiers des données météorologiques futures. Le processus d’application des changements climatiques projeté aux fichiers météorologiques historiques du FMCCE met en soulignant l’importance de la période d’enregistrement, car toute différence au cours de cette période se propagera aux fichiers des données météorologiques futures.

Les ajustements des valeurs horaires dans les fichiers des données météorologiques futures du PCIC sont appliqués aux températures du thermomètre sec et de point de rosée, à l’humidité relative et à la pression de surface. Toutes les autres variables stockées dans le fichier de données météorologiques historiques restent inchangées. Par conséquent, les valeurs horaires du rayonnement solaire, de la vitesse/direction du vent, de la couverture nuageuse, etc., dans le fichier météorologique historique – FMCCE2016, période de 1998 à 2014 – qui est utilisé comme période d’enregistrement de référence et dans les trois fichiers des données météorologiques futures générés sont identiques. Les résultats sont trois fichiers des données météorologiques futures décalés de 30 ans, utilisant le RCP8.5, pour les périodes suivantes : années 2020 (2011 à 2040), années 2050 (2041 à 2070), années 2080 (2071 à 2100).

Les fichiers des données météorologiques futures développés par le CNRC sont obtenus directement à partir de projections climatiques de réduction d’échelle dynamique et avec une correction de biais utilisant le modèle canadien du système terrestre de deuxième génération, CanESM2 (un modèle global à résolution grossière). Ce travail s’appuie sur le cadre développé par le projet Bâtiments et infrastructures publiques de base résilientes aux changements climatiques (BIPBRCC), où le grand ensemble CanESM2 – composé de 50 simulations du modèle CanESM2 avec différentes conditions initiales – a été dynamiquement réduit à l’aide de la version 4 du modèle régional canadien du climat (CanRCM4). Le CNRC a utilisé un sous-ensemble de 15 simulations du grand ensemble CanRCM4 pour obtenir les projections climatiques. Certaines variables climatiques n’étaient pas directement disponibles dans le grand ensemble CanRCM4 à l’échelle horaire et ont donc été estimées : les précipitations (à partir des précipitations), la couverture neigeuse (à partir de l’épaisseur de la neige), ainsi que le rayonnement solaire horizontal direct, normal direct et diffus (à l’aide de méthodes établies dans la littérature).

Le CNRC a suivi les étapes suivantes pour générer ses fichiers des données météorologiques futures:

  • Huit séries chronologiques de 31 ans ont été extraites de chacune des 15 séries de CanRCM4 pour inclure une ligne de base (1991 à 2021) – produite à partir des données historiques modélisées, et sept périodes futures exprimées en fonction des niveaux de réchauffement planétaire : +0.5°C, +1.0°C, +1.5°C, +2.0°C, +2.5°C, +3.0°C et +3.5°C.
  • Les séries temporelles climatiques ont été corrigées des biais en utilisant comme référence les observations aux stations de la base de données des Fichiers météorologiques canadiens pour l’énergie et le génie (FMCEG) d’ECCC.
  • En utilisant la procédure du FMCCE (basée sur la méthode AMT), des fichiers d’années météorologiques types (AMT) des périodes actuelles et futures ont été préparés pour chaque niveau de réchauffement climatique.
  • L’équipe du CNR a calculé les périodes correspondantes pour chaque niveau de réchauffement climatique en déterminant l’année pour laquelle les températures moyennes mondiales dans CanEMS2 ont dépassé chaque niveau (+0.5 à 3.5°C) par rapport à la période 1991-2021. Cette année a ensuite été utilisée comme centre des périodes de 31 ans.
  • En utilisant une méthode basée sur la température [2], l’année typique à échelle réduite (ATER), l’année extrêmement froide (AEF) et l’année extrêmement chaude (AEC) des périodes actuelles et futures ont été préparées pour les utilisateurs intéressés par les sous-ensembles de données typiques et extrêmes pour les applications dans le domaine de la construction.
  • Pour les applications relatives à l’humidité des bâtiments (c’est-à-dire simulation hygrothermique), l’année de référence pour l’humidité (ARH) comprend une année de conditionnement (année médiane) et une année extrême (année à 10 %) qui ont été préparées sur la base de l’indice d’humidité [3].

Des informations plus détaillées sur la méthode des fichiers des données météorologiques futures sont également disponibles dans les documents techniques du PCIC et du CNRC. Pour des conseils sur l’utilisation de ces fichiers des données météorologiques futures, voir l’article « Guide sur l’utilisation des données climatiques futures pour la simulation de la performance des bâtiments« .

Références

  1. Belcher S., E., Hacker J., N., Powell D., S. (2005). Constructing design weather data for future climates. Building Services Engineering Research and Technology, 26: 46-61. https://doi.org/10.1191/0143624405bt112oa
  2. Nik, M., V. (2016). Making energy simulation easier for future climate – Synthesizing typical and extreme weather data sets out of regional climate models (RCMs). Applied Energy, 177: 204-226. https://doi.org/10.1016/j.apenergy.2016.05.107
  3. Cornick, S., Djebbar, R., Dalgliesh, W., A. (2003). Selecting moisture reference years using a Moisture Index approach. Building and Environment, 38(12): 1367-1379. https://doi.org/10.1016/S0360-1323(03)00139-2